Confinement, 8ème jour…
Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme !
Le ciel est bleu, oui, je le vois un peu par-dessus le toit, mais surtout reflété dans le panneau-miroir que j’ai installé sur le rebord de la fenêtre afin d’éclairer un peu, avec une efficacité limitée, le studio parisien, très sombre, dans lequel, comme des millions et des millions d’autres à travers le monde, je suis « confiné » depuis huit jours
La cloche, dans le ciel qu’on voit,
Doucement tinte …
C’est vrai, j’entends les cloches des églises, ce qui n’arrive jamais habituellement
Un oiseau sur l’arbre qu’on voit,
Chante sa plainte.
Je ne vois pas d’arbre, et comme oiseaux, je n’entends que le roucoulement des pigeons qui, malheureusement, ont toujours l’air en pleine forme, et échappent apparemment au virus…
Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là vient de la ville.
Aucune rumeur de la ville là où je suis, dans un appartement donnant sur une cour intérieure. Et quand je sors, le silence dans les rues, quelques passants, l’air soucieux, protégés ou non par un masque. Je pense à ces images de villes en guerre, Sarajevo par exemple, avec ces gens profitant d’une accalmie pour sortir et acheter l’essentiel, craignant d’être fauchés par les balles de snipers invisibles. Là, le sniper est invisible, lui aussi, mais on n’entendra pas les balles, on ne les sentira pas si elles nous frappent …
Qu’as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu’as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse ?
Je ne pleure pas sans cesse, mais comme d’autres, j’imagine, le temps de réfléchir à ce qu’on a fait, ce qu’on fera quand tout sera fini, qu’on pourra ressortir, revivre ! Je ne crois pas au « tout ne sera pas comme avant », du moins collectivement, compte tenu de ce qu’est la nature humaine et sa propension à oublier très vite, mais à titre individuel, peut-être.
Nous ne sommes pas incarcérés comme Verlaine, nous sommes simplement « confinés ». La différence aussi, c’est que nous ne savons pas quand se finira notre peine ! Mais allez, il faut garder le moral …
Philippe Moreau
Paris, 24 mars 2020