Le rôle des sénateurs représentant les Français établis hors de France est le même que celui de tout autre sénateur : participer au travail législatif ainsi qu’au travail de contrôle du gouvernement. Ils sont élus par les députés et sénateurs des Français établis hors de France, les conseillers des Français de l’étranger et les délégués consulaires. Ils sont au nombre de douze, élus pour un mandat de six ans avec un renouvellement partiel tous les trois ans.
Jean-Yves Leconte, Sénateur représentant les Français établis hors de France :
Être Française ou Français et vivre à l’étranger ne doit aucunement se traduire par une baisse du sentiment d’appartenance à la communauté nationale. Se sentir pleinement Français, lorsque l’on vit hors de France, c’est participer avec nos points de vue, nos expériences et compétences aux débats et choix qui se font , en y apportant, autant que nous le pouvons « les idées du Monde ». C’est aussi pouvoir compter sur la solidarité nationale en cas de difficulté, et pouvoir transmettre, à nos enfants, même à l’étranger, ce sentiment d’appartenance à la Nation. Ceci impose de la part de notre pays des politiques publiques à destination des Français installés à l’étranger qui répondent à cette ambition, à cette conception de la nationalité française. Utopique ? Peut-être. Mais c’est une démarche qui mérite que l’on s’y consacre. La représentation politique des Français établis hors de France s’inscrit dans ce cadre, avec cet objectif. Celui d’une France qui considère utile et nécessaire d’avoir à l’Assemblée nationale et au Sénat des représentants des Français établis hors de France, pour y jouer pleinement leur rôle de parlementaires : contrôler l’action du gouvernement et voter la loi.
Je considère que cette mission est encore plus indispensable dans un moment où nous percevons combien nous sommes interdépendants, et que de nombreux défis (climatique et écologique, numérique avec ses conséquences potentielles sur les libertés, etc.) sont aujourd’hui communs à l’ensemble de l’humanité. Avec des représentants des « Français du monde » au sein de son Parlement, la France illustre son universalisme. Ceci nous oblige à être vigilants, à ne jamais devenir des représentants d’une communauté d’intérêt, même si nous devons porter sans relâche les préoccupations des Français de l’étranger.
C’est avec cette inspiration et ces convictions que j’essaie depuis maintenant 10 ans de remplir cette mission qui s’inscrit dans le rythme de l’activité du Sénat. Lors des nombreuses auditions, commissions d’enquête, discussions en commissions des lois et des affaires européennes, des questions au gouvernement et, en séance publique lorsque nous construisons la loi, en déposant et défendant les amendements qui semblent répondre aux enjeux et aux préoccupations que nous devons porter. En faisant valoir ce que nous apprenons, hors de France, par notre propre expérience, mais aussi grâce aux échanges avec les élus consulaires, les associations, syndicats ou chambres de commerce…Bref, avec les acteurs de la présence française et européenne à l’international, tant lors de déplacements que, depuis le printemps 2020 principalement par le biais de visioconférences.
Au cours de ces années, il aura fallu, sans relâche, informer nos collègues parlementaires des spécificités et problématiques (souvent mal connues) qui nous concernent, et défendre au Parlement notre réseau d’enseignement français à l’étranger, sa qualité, ses valeurs et son développement, notre réseau consulaire et la coopération européenne sur ces questions, adapter nos outils de protection sociale aux besoins de Français dans des situations de plus en plus diverses à l’étranger, aux conditions de versement des retraites, de leur calcul lorsque les carrières sont internationales, au droit à une prise en charge par l’assurance maladie en France après avoir liquidé sa pension française, et aussi être vigilant sur une fiscalité qui, s’appuyant trop souvent sur l’image erronée de Français à l’étranger qui seraient des « expatriés fiscaux », en devient discriminatoire, défendre la présence économique française à l’international et les outils de promotion de la francophonie et des cultures francophones. Il faut aussi défendre cette représentation politique, et la manière dont elle est choisie, en veillant à l’exercice de processus électoraux connus, lisibles et efficaces quel que soit le lieu de résidence des électeurs. Depuis la pandémie de Covid-19, nous devons à chaque nouveau projet de loi de gestion de la crise sanitaire, à chaque nouvelle annonce de restrictions, veiller à ce que la situation soit acceptable pour les Français vivant hors de France en maintenant une mobilité raisonnable dans chaque situation, à veiller à l’absence de nouvelle situation discriminatoire. Cela exige une mobilisation de tous les instants, tant les inquiétudes et les attentes sont grandes. Cette mission s’appuie nécessairement sur les retours du terrain, de la part des élus consulaires et de notre association. C’est aussi la continuité de notre « vécu » et nos engagements lorsqu’avant d’être parlementaires, vivant à l’étranger, nous étions déjà mobilisés pour défendre notre rôle et notre place dans la communauté nationale. Tout ce travail et ces efforts ne suffisent pas toujours à obtenir gain de cause, mais j’ai la conviction que nous faisons avancer les choses, même si parfois cela est beaucoup plus long que nous l’imaginions au départ…
Sources : Magazine Français du Monde 204