Pouvez-vous nous rappeler l’histoire de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), qui a connu des modifications liées aux changements dans la représentation des Français de l’étranger ?
L’Assemblée des Français de l’Étranger (AFE) a été créée en 2004. Elle a succédé au Conseil supérieur des Français de l’étranger (CSFE) mis en place 1948. La première véritable réforme du CSFE interviendra avec la Loi de 1982, qui instaure notamment l’élection au suffrage universel des délégués au CSFE, qui n’est plus composé de personnalités désignées, et l’élection des 12 Sénateurs par les seuls membres élus du CSFE.
La loi de 2013 a réformé profondément la représentation politique des Français établis hors de France en offrant une représentation de proximité avec la création des conseils consulaires, en rénovant le fonctionnement de l’AFE et en élargissant le collège électoral des douze sénateurs représentant les Français établis hors de France.
Comment est organisée l’AFE ? Quelles sont ses lignes d’action ? Et quel est son impact ?
L’AFE est souveraine quant à son organisation, elle détermine le champ d’action des six commissions thématiques qui la composent : Finances, budget, fiscalité (présidence assurée par le groupe FDM-ES) ; Commerce extérieur, développement durable, emploi et formation ; Enseignement, affaires culturelles, audiovisuel extérieur, et francophonie (présidence FDM-ES) ; Lois, règlements, et affaires consulaires ; Sécurité, et protection des personnes et des biens (vice-présidence FDM-ES) ; Affaires sociales et anciens combattants (vice-présidence FDM-ES).
Ces commissions livrent un travail d’expertise sur ces différentes thématiques à l’aide d’auditions donnant lieu à un rapport en fin de chaque session. Ces derniers débouchent sur des résolutions ou motions qui ont pour but de réorienter les politiques à destination des Français de l’étranger. L’autre levier d’action, ce sont les questions écrites ou orales : 136 ont été déposées par les élu-es FDM-ES. Ces questions sont un moyen d’attirer l’attention sur les problèmes rencontrés en circonscription par nos concitoyens. L’un des objectifs du groupe FDM-ES est de faire en sorte que ce travail soit repris par les parlementaires à travers des propositions de lois ou des amendements. Dans le cadre de nos réunions de groupe, nous avons toujours pris soin de convier des parlementaires, pas seulement ceux représentants les Français de l’étranger, afin d’effectuer un travail de sensibilisation aux problèmes que rencontrent nos compatriotes expatriés.
Vous présidez le groupe « Français du monde, écologie et solidarité ». Pour quelles raisons existe-t-il des groupes au sein de l’AFE ?
Il faut 10 élu-es pour pouvoir constituer un groupe à l’AFE. Comme dans chaque Assemblée il y a plusieurs groupes politiques qui défendent une vision politique différente. Même si beaucoup des textes de l’AFE sont adoptés à l’unanimité, il existe des visions politiques différentes concernant les politiques publiques des Français à l’étranger, que ce soit en termes de bourses scolaires, de direction donnée à l’AEFE, sur la sauvegarde de moyens consulaires…
De la même manière qu’à l’Assemblée nationale ou au Sénat, le fait d’être constitué en groupe permet d’avoir un temps de parole défini pour les allocutions aux ministres, d’avoir un nombre de postes pré établis à la proportionnalité des groupes, de fixer le nombre d’élu-es de chaque groupe dans chaque commission. De plus, à l’issue de l’allocution du secrétaire d’État aux Français de l’étranger, chaque président de groupe a droit à une réponse, suivie de l’intervention des président-es de commission.
Pouvez-vous nous donner un rapide bilan de l’action du groupe « Français du monde, écologie et solidarité » ?
Nous nous sommes fortement mobilisés pour remettre en cause la CSG-CRDS à destination des Français de l’étranger, qui avait donné lieu à une condamnation de la France par la CJUE. À l’heure actuelle, nous nous battons encore pour que cette mesure soit mise en application pour les Français hors Union européenne. Nous avons été les premiers à tirer la sonnette d’alarme sur la réforme de l’imposition des non-résidents et nous militons toujours pour le retrait de cette réforme.
Nous avons présenté nos 30 propositions pour l’enseignement français à l’étranger, comme par exemple, défendre l’augmentation du Qmax (seuil au-delà duquel la famille sera hors barème) dans le calcul des bourses scolaires, mesure mise en œuvre sur la campagne 2019. Nous avons été à l’initiative de pétitions sur la défense du réseau et plus récemment, en février 2020, d’une pétition dénonçant la baisse du pouvoir d’achat des fonctionnaires détachés à l’étranger que provoquerait la prise en compte pour le calcul des cotisations sociales, à hauteur de 28,12%, des indemnités de cherté de vie (ISVL).
Dans le domaine des bourses scolaires, nous avons été vigilants à l’enveloppe budgétaire, mais surtout nous n’avons eu de cesse à sensibiliser nos conseillers consulaires à une forme d’auto-censure qui conduirait certains postes consulaires à ne pas dépenser leur enveloppe locale alors que les besoins existent.
Nous nous sommes également mobilisés contre le décuplement des frais de scolarité dans l’enseignement supérieur en France, pour les étudiants non Européens. De manière plus symbolique, nous avons obtenu que la devise républicaine « Liberté, Egalité, Fraternité » soit inscrite au fronton des établissements scolaires en gestion directe.
En matière sociale, le groupe a joué un rôle moteur dans la réforme de la CFE, relayé au Sénat par nos sénateurs. Dans un tout autre domaine, nous avons demandé que la loi Egalim, promulguée le 2 octobre 2018, trouve son application à l’étranger, notamment pour ce qui concerne l’obligation de proposer un menu végétarien par semaine et l’interdiction des bouteilles en plastique dans les cantines scolaires. Nous avons également déposé une motion de groupe, en mars 2017, portant sur l’éradication des armes nucléaires, motion adoptée par l’AFE.
Dans le cadre du remplacement de la réserve parlementaire par le dispositif STAFE, nos représentants en commission nationale ont fait une dizaine de propositions, basée sur les résultats du questionnaire réalisé auprès des conseillers consulaires. Cela a donné lieu à une résolution de la commission des finances adoptée à l’unanimité et à l’adoption de ces propositions par la Direction des Français à l’étranger et de l’administration consulaire du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, dans les instructions officielles de la deuxième campagne.
Propos recueillis par Florence Baillon
Extrait du magazine Français du monde n°200