Formé à l’école normale d’instituteurs en Moselle, je découvre l’Asie en étant coopérant du service national au Lycée Franco-Japonais de Tokyo en 91-93 et prolonge d’un an mon séjour pour y apprendre le japonais : l’attrait de l’Asie du Nord-Est est tel qu’après un bref passage au lycée français de New-York, je pars pour un premier séjour en Corée (1995-2001) comme directeur pédagogique du premier degré au lycée français de Séoul, puis à Taipei, Taïwan, en tant que Chef d’Etablissement d’une école intégrée à un campus européen (2001- 2002). Depuis 2002, j’enseigne à nouveau au lycée français de Séoul, où j’ai participé à la mise en place de la section bilingue français anglais et mon intérêt, ma passion même, pour cette mission d’enseignement est sans cesse renouvelée. C’est un des axes forts de ma vie d’expatrié depuis 26 ans dont 25 en Extrême Orient.
Un autre point essentiel de ma vie est la Corée, où pourtant je ne suis venu que faute d’avoir un poste me permettant un retour au Japon ! Mais très vite l’apprentissage du coréen (bien plus difficile pour moi que le japonais !) me permet d’accéder à la culture, à l’histoire de ce pays et de rencontrer directement des Coréens. Dans une société qui fonctionne par cercles relationnels séparés, le fait d’être étranger permet de pénétrer les divers groupes et de créer des liens. L’étude de l’histoire et de la culture m‘amène à faire collection des livres et publications francophones antérieurs à 1950 sur ce pays, à organiser des séjours de découverte de la Corée pour mes jeunes élèves, des promenades culturelles pour nos compatriotes et à coécrire la partie sur Séoul du guide vert Michelin « Corée » ; à participer aussi , avec des amis universitaires, au comité éditorial de l’Atelier des Cahiers, maison d’édition associative consacrée à la publication d’ouvrages sur la Corée et, plus largement, à l’Asie de l’Est.
La Corée a beaucoup changé depuis 22 ans, Séoul est une mégalopole qui se transforme aujourd’hui dans le respect de l’environnement avec pour objectif le bien-être de ses habitants. Quand on vit au Pays du Matin Calme, le dynamisme des Coréens vous porte, et si cela reste bien un pays de contrastes avec des étés très chauds et humides et des hivers très froids et secs, des aliments très fades ou très épicés, des réussites économiques extrêmes avoisinant une grande pauvreté cachée dans les vestiges d’anciens bidonvilles en périphérie de la capitale (les « dal dongnae » ou villages de la lune), des habitants à la fois très fiers et très accueillants, le pays a su se moderniser sans renier ses traditions ; en témoignent le renouveau du Temple Stay, le retour aux vêtements traditionnels et la mise en avant de la gastronomie traditionnelle, dont le gouvernement souhaite faire un des atouts touristiques du pays.
Ma rencontre avec Français du Monde, alors ADFE, s’est faite au Japon, par des amis ; l’appel du terrain, la volonté d’agir avec les Français du Japon, d’aider les petites structures ainsi que la rencontre de Guy Penne et d’autres élus, m’ont ancré tout naturellement dans l’association. Avec 4 ou 5 amis, nous avons créé la section Français du Monde à Séoul en 1995, et au-delà des activités classiques d’animation de la section, nous avons institué depuis 14 ans un marché de Noël qui nous donne une grande visibilité (il a même été choisi pour participer à la clôture de l’année culturelle France Corée) et aussi les moyens financiers de mener de nombreuses actions de solidarité : ainsi, le Groupe d’Accompagnement des Prisonniers que nous avons fondé, accompagne les compatriotes incarcérés à Séoul et Taïwan (souvent des affaires de « mœurs » ou de drogue) lors des procès et surtout des visites sur place, maintient le lien avec les familles et mène des actions de prévention notamment auprès de nos jeunes concitoyens, afin de leur expliquer les différences sensibles entre le droit français et le droit coréen, les moeurs et les usages locaux. J’ai participé au Conseil d’administration de Français du Monde entre 2003 et 2009 et suis actuellement membre de la commission des conflits. L’adhésion à la Fédération des Français de l’étranger du PS pour globaliser le travail associatif et des responsabilités syndicales (1995-2001) complètent mon engagement au service des Français de l’étranger. Cet engagement militant est le troisième point central de ma vie.
Remise de l’insigne de Chevalier de l’Ordre national du mérite à Pierre ORY par Hélène CONWAY-MOURET, Sénatrice des français de l’étranger et ancienne Ministre, en mai 2017
Enfin, quatrième axe fort depuis 2014 : j’ai été élu conseiller consulaire (liste « Français du monde, citoyens et solidaires ») dans la circonscription électorale de Corée du Sud – Taïwan, un engagement qui a paru logique après avoir longtemps représenté localement René Aicardi, conseiller à l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE) dans les diverses commissions consulaires. Mon rôle de conseiller consulaire est multiple, je représente les Français de la circonscription auprès du Consulat, de l’Ambassade, des comités thématiques, des conseils d’établissement de nos différentes structures éducatives, je suis à leur écoute, fais remonter leurs inquiétudes ou leurs demandes, je travaille avec les parlementaires… Mais le plus marquant pour moi ce sont les rencontres, d’une richesse et d’une variété étonnante, du prisonnier au chef d’entreprise, de l’étudiant au missionnaire, des isolés aux couples binationaux dont le nombre augmente fortement du fait, notamment, du développement des échanges d’étudiants entre les deux pays et qui font face à des défis nouveaux dans la société coréenne. Il y a environ 4500 Français en Corée dont 1000 étudiants et 45% de la communauté vit hors Séoul , d’où la nécessité de me déplacer pour les rencontrer et répondre à leurs sollicitations, ainsi qu’à celles des 4000 concitoyens établis à Taïwan qui fait partie de la circonscription.
Cindy DUBRUEL et Pierre ORY, Conseillers consulaires de la liste FdM-ADFE Corée du Sud – Taïwan
La population française en Corée a beaucoup changé, les Français à statut d’expatriés ont été rejoints par des étudiants, des personnes en contrat local et toutes ces familles binationales ; ce qui entraine des problématiques nouvelles, en terme de bourses scolaires, d’emploi, et de besoins d’aide sociale. C’est pourquoi j’ai cofondé en 2015 le Fonds d’Entraide Sociale Corée dont l’objectif est l’assistance financière envers nos compatriotes qui rencontrent une situation de détresse (problèmes de santé sans assurance médicale, frais de défense en justice…) et je fais également, avec un gendarme du poste et la section consulaire, de la prévention auprès des jeunes du lycée français, à propos des drogues, de la loi coréenne, de l‘utilisation des images….
Entraide solidaire dans un ancien bidonville du sud de Séoul avec Annick FLAMANT, Présidente de FdM-ADFE Corée et Pierre ORY
Au jour le jour, tant dans mon métier qu’à travers mes engagements et mon mandat de conseiller consulaire, j’essaie d’agir pour une France plus juste, de mieux faire connaître la Corée et de faire vivre les mots de Gaston Berger : « Demain ne sera pas comme hier. Il sera nouveau et dépendra de nous ».