Accueil 5 L'association 5 Dernière session de l’Assemblée des Français de l’étranger : un dispositif et un bilan liés à la situation sanitaire ( Page )

L’Assemblée des Français de l’étranger a réalisé sa 34ème session, avec deux particularités: toutes les réunions se sont déroulées en virtuel pour des raisons sanitaires et il s’agissait de la dernière session pour les conseillers élus, puisque les élections à venir verront le renouvellement du corps électoral. Retrouvez le discours de Mehdi Benlahcen, président du groupe « Français du monde, Écologie et solidarité », lors de la 34ème session de l’AFE, auprès de monsieur Jean-Baptiste Lemoyne, Secrétaire d’État auprès des Français de l’étranger.

« Monsieur le Ministre,

Le service public est un peu comme une assurance. Lorsque l’on ne connaît aucun incident, on trouve souvent que l’on paie trop cher et que cela ne sert pas à grand-chose, du coup on essaie de faire des économies dessus. On se rappelle donc de l’utilité de la chose en cas d’imprévu. Il en va de même pour nos services publics, on se rend compte de leur utilité en temps de crise.

Depuis plus de vingt ans, et encore plus depuis 2017, on ne cesse de faire des économies sur ces derniers et, pourtant, ce sont bien eux qui sont en première ligne depuis bientôt un an pour faire face à la crise sanitaire.

La situation n’est pas bien différente pour les Français de l’étranger : plus que jamais, nous avons besoin de nos services publics, plus que jamais, nous avons besoin que nos services consulaires soient dotés de moyens, plus que jamais, nous avons besoin qu’ils soient soutenus par le politique pour qu’ils soient en situation de traiter les dossiers de nos ressortissants avec un surcroît de fraternité et d’humanité.

Dans cette situation de crise, nos consulats sont débordés par l’afflux de dossiers de bourses, par le traitement des aides Covid, le tout – je le répète – sans moyens supplémentaires et après avoir payé un lourd tribut, ces dernières années, aux suppressions de postes.

C’est dans ce contexte que l’on va demander aux postes d’organiser des élections en mai 2021. S’il est grand temps que ces élections aient lieu, et si la pandémie ne doit plus suspendre le temps du débat démocratique, comment faire pour organiser ces élections dans de bonnes conditions ?

Au groupe « Français du monde, Écologie et Solidarité », nous sommes inquiets. Nous entendons les remontées de nos conseillers consulaires et de certains postes. Dans certains pays, il sera difficile d’organiser le scrutin fin mai du fait de l’évolution du virus. Dans d’autres, le déroulement du vote et la participation seront rendus difficiles par la fermeture ou l’impossibilité de se rendre au bureau de vote. Si je prends l’exemple de mon pays de résidence, le Portugal, le vote, s’il peut être permis – ça reste à négocier avec les autorités locales -, sera rendu quasiment impossible par le fait que nous n’avons pas le droit de circuler hors de notre municipalité le week-end. Ainsi, les Français résidant hors de la mairie où se tient le bureau de vote ne pourront aller voter.

Je sais que vous me répondrez « vote électronique », Monsieur le Ministre. Je vous répondrai à mon tour, qu’aucun test grandeur nature n’a été réalisé avec la société qui a remplacé Scytl. Que se passerait-il s’il devait y avoir un couac ? Je vous répondrai également que même si un gros effort a été fait pour mettre à jour les adresses Internet, il en manque encore beaucoup (20 %) et un grand nombre sont erronées (20 % des 80 %).

En 2014, dans beaucoup de circonscriptions, certains sièges de conseillers se sont joués à une voix, voire même à l’âge en situation d’égalité. Avec une baisse de la participation prévisible et une multiplication des listes déposées dans chaque circonscription, il est à craindre que ces situations soient plus nombreuses. Il est à craindre surtout que les recours contre les élections fleurissent dans chaque circonscription où des électeurs pourront faire la preuve qu’ils ont été « empêchés » de voter.

Cela fait maintenant bientôt un an que nous sommes dans cette situation, et nous regrettons une forme d’impréparation. Nous aurions dû tirer les leçons de 2020, pour mieux anticiper 2021.

D’humanité, il en est encore question sur le problème de l’interdiction de rentrer en France imposée aux Français de l’étranger hors Union européenne. Jamais, Monsieur le Ministre, une pétition lancée par des Français de l’étranger, sur les Français de l’étranger, n’avait connu une telle ampleur et un tel écho : 10 000 signatures en 48 heures, 25 000 aujourd’hui. Dans de nombreux cas, des situations douloureuses : des couples séparés, des rapatriements sanitaires qui posent problème, etc. Nous avons conscience de la situation sanitaire, mais, là encore, nous avons l’impression d’être des victimes collatérales d’une forme d’impréparation. Nombre d’entre nous sont rentrés ces derniers mois en France. Nous avons pu constater à quel point aucun contrôle n’était effectué à l’arrivée. Encore une fois, nous payons là l’insuffisance de dotation pour les services publics qui ne permettent pas de mettre en place ces contrôles. Pour y faire face, on cède donc à une solution de facilité en rognant sur nos droits fondamentaux au retour. Quel que soit l’assouplissement des motifs impérieux envisagé, ce n’est pas acceptable.

Enfin, en cette journée du 8 mars c’est également de fraternité et de solidarité dont il est question quand il s’agit d’évoquer la situation de nombreuses femmes qui se retrouvent, dans un pays étranger dont elles ne maîtrisent ni la langue ni les codes, dans une situation de violence intrafamiliale et ne savent pas vers qui s’orienter.

Malgré les interventions répétées de plusieurs parlementaires en 2020, dont Claudine Lepage, les sites des ambassades et consulats n’affichent toujours aucune information. Certes, les législations locales et les principes de non-ingérence empêchent parfois une assistance active, mais information, orientation et soutien devraient être une évidence pour nos services consulaires.

Je vous remercie de votre attention, Monsieur le Ministre. »

Mehdi Benlahcen, président du groupe « Français du monde, Écologie et solidarité

 à lire aussi