La Covid-19 et son expansion mondiale auraient pu mettre fin aux échanges universitaires et notamment aux programmes Erasmus. Le Brexit, qui a déclenché le retrait du Royaume-Uni de l’Union, aurait également pu fragiliser l’ensemble. Et pourtant c’est l’inverse.
En effet, contrairement à ce que l’on pourrait croire, les programmes Erasmus +, qui couvrent 33 pays en Europe et 167 hors Europe, sont toujours autant plébiscités, malgré le très fort ralentissement des déplacements internationaux. Selon les chiffres officiels français, en 2020 les demandes de mobilité Erasmus + ont augmenté de 7 %. En France, 100 000 personnes en moyenne bénéficient du programme chaque année : plus de 50 % d’étudiants (stages ou études), environ 30 % d’alternants, stagiaires et formateurs de la formation professionnelle et 20 % d’enseignants et professeurs.
De plus, mi-décembre, les instances européennes ont validé un accord qui permet d’augmenter la part du budget Erasmus + pour un montant total de 23,4 Mds € sur sept ans pour la période 2021-2027, soit 10 milliards de plus que sur la programmation précédente. Cette augmentation, évoquée avant l’apparition du virus, va permettre non seulement d’accroître le nombre d’étudiants, d’élèves et de professionnels qui profiteront de cette expérience, mais également de diversifier les profils. L’objectif est d’atteindre 10 millions de mobilités européennes en seulement sept ans, ce qui permettrait à la moitié d’une classe d’âge d’avoir passé, avant ses 25 ans, au moins six mois dans un autre pays européen.
Il s’agit donc de toucher de nouveaux publics, en particulier ceux qui jusqu’à maintenant ne se sentaient pas concernés par l’offre Erasmus +, souvent perçue dans l’opinion publique comme plutôt universitaire : c’est le cas des apprentis, des adultes en réinsertion, des personnes en situation de handicap. Dans l’enseignement secondaire, les collèges pourront participer, ainsi que les lycéens des établissements professionnels, à des stages hors Europe.
Erasmus + s’est d’ailleurs adapté aux nouvelles conditions sanitaires avec une offre de « mobilité hybride » constituée de cours à distance et mobilité physique, dispositif qui pourrait être pérennisé. Enfin, Erasmus + intégrera davantage la dimension climat avec une bourse revalorisée pour les participants utilisant des moyens de transport moins polluants.
Côté institutions, il s’agit également de favoriser la création d’alliances entre universités européennes, afin d’activer un réseau de campus européens : il est question de 41 alliances entre 294 établissements, ces derniers regroupant 18 % des étudiants de l’Union. La France souhaite la création d’un diplôme européen d´enseignement supérieur. L’enseignement professionnel n’est pas oublié avec la création de centres d’excellence pour l’apprentissage et la formation professionnelle.
Les absents ont toujours tort…
Concernant le retrait du Royaume-Uni, qui est sorti également du programme pour cause de Brexit, alors que c’était la deuxième destination préférée des demandeurs, la lenteur des négociations a permis une certaine anticipation. On constate, depuis 2016, des demandes de mobilité réorientées vers l’Espagne (destination favorite des Français en Erasmus), mais surtout l’Irlande et les pays anglophones du Nord de l’Europe. Le gouvernement britannique aurait pu opter pour le statut de pays tiers comme la Norvège, l’Islande ou la Turquie, ce qui n’est pas le cas et une diminution brutale du nombre d´étudiants optant pour ce pays est à prévoir. De plus, il faudra compter avec le coût d’un visa (environ 400 €), des frais d’inscription onéreux et l’absence de bourses. L’Irlande devrait se convertir en grand bénéficiaire de ce changement.
De nouvelles modalités et perspectives, un soutien renforcé et un élargissement au plus grand nombre : non seulement Erasmus + se porte bien, mais devrait être plébiscité encore plus après des mois d’immobilité forcée. Espérons que son impact social et économique pour la jeunesse accompagne la relance attendue dans tous les pays.
Florence Baillon