Accueil 5 L'association 5 Damien Martin : d’un voyage de fin d’études au Bénin à la création d’une école « pas comme les autres  » à Zinvié. ( Page 2 )
  • Damien et le Bénin

Je suis arrivé au Bénin en 2002 à l’occasion d’un voyage de fin d’études et je n’en suis pas reparti. Je terminais alors un BTS en aquaculture en France et j’avais trouvé une opportunité pour effectuer un stage à la Faculté des Sciences Agronomiques d’Abomey-Calavi. Ce stage avait pour but de faire l’inventaire des poissons d’aquarium dans les eaux locales. Pendant les huit mois de ce stage, une amitié est née avec Martial Kouderin alors élève ingénieur agronome béninois de cette faculté.

En 2005, nous avons dans un premier temps décidé de créer ensemble notre propre entreprise piscicole. Toutefois, malgré nos atouts respectifs (formation adéquate, capacité de mobilisation de ressources, etc.) nous avons été confrontés à un ensemble de difficultés techniques, institutionnelles et financières. Fort de cette expérience, nous avons décidé de créer une organisation non gouvernementale, « CREDI-ONG » dont la mission première est de promouvoir l’aquaculture intégrée pour améliorer le contexte de l’entreprenariat piscicole au Bénin. Par la suite, deux autres missions jugées complémentaires viendront élargir le champ d’action de l’organisation : il s’agit de la protection de l’environnement et de la promotion de l’agriculture paysanne.

Depuis 2005, Martial est le directeur exécutif de l’ONG et j’en suis le directeur technique. Nous embauchons à l’heure actuelle 27 salariés pour animer nos deux outils principaux à savoir la Ferme agro-piscicole Pantodon (3,5 ha exploitée selon les principes de l’agroécologie) et le Parc naturel communautaire de la Vallée du Sitatunga (150 km² d’aire protégée abritant plus d’un millier d’espèces animales et végétales à seulement 35 km de Cotonou). Une vingtaine de bénévoles est également engagé à nos côtés et plus de 200 stagiaires par an sont accueillis et formés par nos soins dans nos différents domaines de compétences. Pour faire fonctionner l’organisation et financer nos actions de terrain, nous recevons notamment des subventions françaises via le Fonds Français pour l’Environnement Mondial, la Fondation pour la Nature et l’Homme et la Fondation Nature et Découvertes. Nous sommes également subventionnés par l’Union Mondiale pour la Conservation de la Nature des Pays-Bas et Pain pour le Monde (Allemagne).

Aujourd’hui, même si beaucoup reste encore à faire, CREDI-ONG apporte chaque jour sa contribution à un Monde plus vert et bleu (c’est sa devise !). Ainsi, grâce à notre travail un réseau puis une fédération des pisciculteurs du Bénin ont vu le jour. Elle rassemble, à ce jour, un millier de membres et est devenu l’interlocuteur principal des institutions étatiques et des partenaires techniques et financiers sur les questions piscicoles au Bénin. De même, la Vallée du Sitatunga, qui était au départ une utopie totale, est une aire protégée en plein développement qui est visitée par plus de 2500 personnes par an et implique aujourd’hui deux communes (Abomey-Calavi et Sô-Ava) et bientôt trois (Zè).

Même si je garde un attachement ombilical à la France, au Bénin j’ai trouvé une façon de vivre mes valeurs alliant écologie, solidarité, humanisme et sobriété. J’aime aussi l’idée de faire du mieux que je peux avec peu de moyens, car je trouve que les contraintes sont stimulantes et qu’elles encouragent la créativité et facilite par la suite la reproductibilité des initiatives. J’aime aussi la liberté d’entreprendre qui existe au Bénin — liberté que je n’aurais pas trouvé aussi aisément en France où il est aujourd’hui difficile de créer et d’innover dans le domaine de la pisciculture, car l’accès à la terre et les normes sont parfois contraignantes.

Le Bénin m’a permis de rêver et d’être l’artisan de mon propre petit paradis tout en aidant les autres.

 

  • Damien et Français du monde-adfe

J’ai découvert Français du monde-adfe en 2014 suite à une visite de l’association à la Vallée du Sitatunga. J’en suis devenu membre l’année dernière. Malheureusement, je ne suis pas aussi actif que je le voudrais. La section locale étant située à Cotonou, c’est dire à une heure de route de chez moi, il m’est difficile de quitter mon lieu de travail pour assister aux rencontres mensuelles. Toutefois, grâce à WhatsApp, je suis régulièrement en contact avec les membres de Français du monde-adfe et de ses sympathisants. Pour moi, comme pour beaucoup d’expatriés, l’association a toujours été un précieux secours sur les questions administratives et dans les relations avec le Consulat.

Je suis marié à Chantal, qui est béninoise, et nous avons deux filles qui ont la double nationalité, française et béninoise. Depuis quinze ans, je vis à la béninoise, j’ai un salaire local, bon nombre de mes amis sont nés ici, je mange béninois, je vis béninois. Français du monde-adfe est une façon pour moi de rester en lien avec la France et les Français. Maintenir ce lien est important car il me permet de me raccrocher à ma culture française, si éloignée de ce que je vis au quotidien, et de la transmettre à mes enfants. Mes filles Divine-Nature et Sagesse connaissent la France, mais à 6 et 2 ans, elles n’ont pas encore la notion des distances et pour elles le monde est petit.

J’aime le Bénin, mais nous ne savons pas de quoi la vie sera faite et j’aimerais bien que ma famille soit capable de pouvoir vivre en France, peut-être à l’occasion des études de mes enfants. Nos filles ne fréquentent pas le Lycée Français car il est à Cotonou et donc trop éloigné. Avec Angélique, une autre française résidant comme nous à Zinvié, nous sommes aujourd’hui en train de faire le choix de ne plus scolariser nos enfants dans une école béninoise, car les méthodes d’enseignement pratiquées ne nous conviennent pas. Nous avons alors eu une idée folle, une nouvelle utopie : créer notre école.

           

  • Les projets, les engagements de Damien

Nous avons décidé de créer une école qui nous ressemble. Avec l’aide d’Angélique, nous travaillons sur le projet d’ouvrir une école qui s’inspirerait des pédagogies actives telles que Freinet, Steiner et Montessori. Ces méthodes ont, selon nous, l’avantage de permettre à l’enfant de développer sa curiosité, d’utiliser tous ses sens afin qu’il s’approprie les connaissances dans le respect de son rythme propre.

L’été dernier, pour expérimenter ces méthodes, nous avons ouvert un petit centre d’éveil et de loisirs pour une dizaine d’enfants de notre localité. Pour ce faire, nous avons recruté une animatrice béninoise et la formons au quotidien et à la hauteur de nos (petites) capacités. Cependant, après un peu moins de deux mois de fonctionnement, nous constatons déjà les effets bénéfiques sur nos enfants. Ils osent s’exprimer librement, posent davantage de questions sur leur environnement et les phénomènes qu’ils y observent, ont un regain d’intérêt pour l’apprentissage des notions élémentaires telles que les mathématiques et la lecture… De plus, une relation forte est née entre les enfants et l’animatrice. Cette expérience nous sert aujourd’hui de tremplin pour aborder le projet de création d’école en douceur. Avec l’aide de nos proches, une campagne de financement participatif a d’ailleurs été lancée autour de nous pour financer l’achat du terrain, des infrastructures et des équipements nécessaires.

Des parrainages d’enfants sont également recherchés pour permettre à l’école d’être accessible à tous quelque-soit le niveau de revenus des parents. L’association Planète Urgences, spécialisée dans la mise en œuvre de missions de congés solidaires est sollicité pour renforcer nos capacités et celles de la future maîtresse. Pour en savoir plus et/ou soutenir l’initiative vous pouvez nous retrouver sur ma page Facebook (Damien Martin) ou me contacter par email :

Propos recueillis par Vincent Delaunay

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