Djamel Bekkai est membre de la section de Boston et professeur de français. Il nous parle de la place unique du français dans le paysage linguistique aux Etats-Unis.
Beaucoup de choses ont été dites sur l’intérêt que les américains portent à la langue française ces dernières années. Il est vrai que l’enseignement des langues ici, outre-Atlantique, obéit à une logique pragmatique. C’est à cette compétition que le français fait face aujourd’hui. Qu’il soit d’ordre économique ou sécuritaire, l’intérêt attribué à une langue est dicté par des considérations pratiques.
Cependant la place du français reste assez unique dans le paysage linguistique aux Etats-Unis. Un privilège qui s’explique par l’histoire conjuguée à un effort déployé par les bénévoles francophiles ainsi que les services culturels de l’ambassade à Washington.
C’est ce qui ressort de l’initiative d’une association new-yorkaise, Face, avec le concours du service culturel de l’ambassade de France. Cette entité a été créée en 2005 et a vu son champ d’action s’élargir au fur et à mesure. Cette association vise à promouvoir toute activité ou initiative visant la promotion du Français mais aussi les échanges culturels entre les deux pays. Dans ce cadre, des étudiants bénéficient de bourses d’études en France ou aux Etats-Unis. Les artistes ne sont pas oubliés non plus, ils peuvent recevoir des aides en tout genre pour la promotion de leurs œuvres. De Face a également découlée une branche qui s’occupe uniquement de l’enseignement du français, c’est le French Heritage. C’est à New-York que cette structure a débuté avec quelques dizaines d’élèves encadrés principalement par des bénévoles. Aujourd’hui le programme du French Heritage jouit d’un succès indéniable. L’effectif des élèves et bénévoles s’est rapidement multiplié et d’autres sections à travers toute la côte Est des Etats-Unis ont vu le jour. En effet, du Maine au nord jusqu’à Miami dans l’extrême sud, le nombre de villes qui ont exprimé leur désir d’avoir ce programme n’a de cesse d’augmenter.
A l’exception de l’état du Maine, les différentes sections disséminées le long de la côte Est travaillent avec la communauté haïtienne. A Miami, New York ou Boston la présence haïtienne est très importante, et c’est notamment à Boston que le programme s’est particulièrement développé jusqu’à maintenant.
L’exemple de Boston est édifiant en ce sens. Tous les samedis des étudiants bénévoles de l’université de Harvard et de Boston se retrouvent à côté des enfants haïtiens pour des cours de soutien de français. Une ambiance bon enfant, agrémentée de chansons françaises et haïtiennes, de pièces de théâtre ou encore des virées géographiques et historiques du pays, les enfants passent le gros de leur temps à apprendre tout en s’amusant, samedi oblige. En effet, ces cours se veulent plus comme un soutien scolaire linguistique récréatif pour ne pas les accabler pendant le week-end.
Le French Heritage a ainsi fêté ses 10 ans d’existence l’année passée, avec un succès indéniable. Alors que le nombre d’étudiants inscrits en français dans les universités américaines, à l’échelle nationale, stagne depuis quelques années, le programme Face avec sa composante French Heritage a connu un essor indéniable. Ce partenariat franco-américain semble donner ses fruits.
Djamel Bekkai