Au Mali, mariages, grossesses précoces et mutilations génitales sont encore très répandus, menaçant la santé et la scolarisation des filles. Selon l’UNICEF, plus de la moitié sont mariées avant 18 ans, une fille sur cinq travaille au lieu d’aller à l’école et 89 % sont victimes de mutilations génitales. Résultat : si les filles sont 61 % à fréquenter le primaire, elles ne sont plus que 24 % à poursuivre dans le secondaire. C’est dans ce contexte que Mariam Sidibé a créé le centre Jigiya Bon où près de 100 filles de 8 à 18 ans sont nourries, logées et soignées avec le soutien de l’ONG Solidarité Laïque, qui cofinance la structure depuis 2010.
« Jigiya ça veut dire maison et bon espoir, c’est la « maison de l’espoir », explique Mariam Sidibé. Quand on entre ici, il y a de l’espoir. Nous accueillons des jeunes filles en situation difficile dont environ 90 % d’orphelines. Le centre n’accueille que des filles issues de milieux très défavorisés qui n’ont pas la chance d’aller à l’école. Nous leur donnons cette chance. Elles fréquentent une école privée, qui leur garantit un enseignement meilleur que dans le public, où les classes sont surchargées et où les enseignants n’ont souvent pas été formés. Je pense que pour lutter pour les droits de la femme, il faut d’abord faire notre devoir et ce devoir c’est d’amener les filles à l’école. Une fille qui est allée à l’école a déjà fait son devoir et est alors en mesure de réclamer son droit et elle le connaît. Cette année a vraiment été exceptionnelle, on a présenté quatre filles au Bac et elles ont réussi toutes les quatre. J e pense que c’est un résultat vraiment satisfaisant qui montre que les filles sont bien encadrées ici et elles sont motivées» .
Le centre soutient aussi l’autonomisation personnelle des jeunes. Un potager a ainsi été aménagé dans l’enceinte du foyer, à la charge des jeunes filles, activité qui mêle apprentissage, loisirs, lien social et utilité collective. Education sexuelle, à la santé et à la citoyenneté font également partie du programme pour qu’elles puissent prendre en main l’amélioration de leur qualité de vie. Fatoumata, qui a fréquenté le centre, témoigne : « J’ai 24 ans, ma mère est handicapée mentale et mon père ne m’a jamais reconnue. Je suis venue au centre en 2004 à l’âge de 14 ans. Actuellement je suis transformatrice de mangue et de beurre de karité, produits locaux du Mali. J’ai une mini-entreprise de transformation depuis 2012 avec 7 employés permanents et 23 employés temporaires selon les commandes. Grâce au centre, je suis autonome et je peux prendre soin de ma mère ».
Pour les jeunes filles qui ont achevé leur scolarité, le centre Jigiya Bon a établi des partenariats avec des écoles professionnelles de la région qui leur proposent des formations dans des domaines variés tels que l’infirmerie, l’électricité, le secrétariat ou le dessin industriel. L’association développe également deux actions de soutien au travail des femmes dans les zones rurales au Nord du pays. A Sikoro, elle forme des femmes à la production de beurre de karité biologique et à Boro, elle a construit un séchoir à oignons entièrement géré par des femmes. « Ces projets garantissent leur sécurité économique et un revenu correct, explique Roland Biache, secrétaire général de Solidarité Laïque. Outre le bénéfice financier qu’en tire la famille et indirectement le pays, ils permettent aux femmes d’acquérir une meilleure autonomie et de gagner en pouvoir décisionnel dans le ménage. Favoriser leur travail, c’est lutter contre la pauvreté et pour le respect de leurs droits d’abord au sein du couple, puis dans la société ».
Pour en savoir plus:
www.solidaritelaique.org
Lire l’intégralité de notre dossier sur les droits des femmes