Depuis le début de mes chroniques, j’essaie d’informer sur la dualité « identité – diversité » de l’économie sociale et solidaire (ESS).
Passons par le continent africain, plus précisément au Cameroun.
Le secteur agricole souffre de plusieurs carences : une multitude de groupes complètement désorganisés à la base, un enclavement de la majeure partie des villages (80% de récoltes avariées), l’impossible commercialisation viable des récoltes des acteurs…
Les pouvoirs publics affirment une volonté d’aide à l’ESS, malgré la méconnaissance du secteur, dans un contexte de décentralisation qui nécessite de préparer les autorités territoriales à accueillir le transfert des compétences.
L’ONG Partenariat France-Afrique pour le co-développement (PFAC) a signé une convention avec l’État via le ministère de l’ESS en juin 2010, et contribue à l’élaboration d’une loi sur l’ESS au Cameroun dont l’adoption est prévue dans les prochaines semaines.
Sur le terrain, le projet se structure.
Aujourd’hui, PFAC agit pour mettre en place 374 regroupements locaux d’économie sociale et solidaire (RELESS) (un dans chaque commune) pour améliorer la qualité de vie des habitants grâce à une meilleure prise en charge des problèmes locaux, une meilleure visibilité de leur territoire par les élus locaux et en faisant participer les administrés aux décisions et aux actions qui les concernent.
Le projet est donc bien multi-acteurs et, par le développement des coopératives dans la filière agricole, crée autant de lieux d’apprentissage de la démocratie.
Un exemple concret : le RELESS de la commune de Mboma
Accompagné par l’ONG PFAC, il regroupe actuellement une douzaine de coopératives réparties dans des filières en cours de développement (piment, plantain, cacao, café, palmier à huile, racines et tubercules, élevage, services…). Elles ont un projet commun en trois points :
– le pavage participatif des pistes rurales pour le désenclavement des villages (projet pilote mené avec le Ministère des travaux publics) ;
– la construction d’un entrepôt pour la collecte, la commercialisation des produits, la concertation et l’échange entre les groupes ;
– et, nerf de la guerre, la recherche de fonds pour le financement des activités des acteurs de l’ESS qui ne bénéficient d’aucun financement.
Des problèmes demeurent et des solutions sont possibles
Les déclarations restent des vœux pieux. C’est pourquoi l’ONG PFAC travaille avec l’Etat camerounais pour construire un espace de concertation public/privé par la mise en place de centres de référence de l’ESS dans les régions.
La base est sensibilisée mais manque de moyens pour agir dans un contexte de méconnaissance de l’économie sociale par ceux mêmes qui pourraient en assurer la promotion. Il faut donc former les responsables, structurer les groupes mobilisés, mettre à leur disposition des moyens permettant la consolidation de leurs activités, affecter des budgets qui iraient jusqu’aux acteurs de ces activités.
L’ONG PFAC recherche des soutiens forts à travers les réseaux existants (nationaux et internationaux) pour « imposer » des actions concrètes aux pouvoirs publics et « secouer » les sphères administratives afin qu’elles agissent rapidement.
Il n’est de vent favorable que pour le marin qui sait où il va, a écrit Sénèque. Assurément, les acteurs de terrain ont des projets concrets. Les vents leur apporteront-ils les incontournables soutiens nécessaires pour booster cette dynamique qui place l’Humain au cœur de son objectif ?
Si vous êtes en capacité de les aider, réagissez à cette chronique !
Benjamin Ty-Shen