Madame la ministre,
La publication de caricatures de Mahomet dans l’édition de Charlie Hebdo de ce jour met en danger nos communautés françaises à l’étranger : individus isolés, postes diplomatiques et leurs agents, écoles, élèves et enseignants pourraient être la cible, dans les prochaines heures, d’actions violentes.
Notre association a pris acte des mesures déjà prises : fermeture de nos postes diplomatiques vendredi prochain dans tous les pays concernés, fermeture des écoles françaises à Tunis dès aujourd’hui et jusqu’à lundi prochain, publication d’un appel à la prudence aux Français résidents ou de passage dans ces pays sur le site Conseils aux voyageurs. Nous vous en remercions et demandons que toute mesure complémentaire de nature à renforcer la sécurité des Français dans le monde arabe et les pays musulmans soit mise en œuvre. Nous nous tiendrons en étroit contact avec le Centre de crise pour que les informations et les demandes qui remontent de nos sections soient prises en compte.
Notre association regrette que l’hebdomadaire Charlie Hebdo ait choisi cette date du 19 septembre, une semaine après les émeutes meurtrières qui ont enflammé le monde musulman, pour publier des dessins ressentis comme une provocation par les opinions publiques dans les régions du monde où de nombreux Français, souvent binationaux et musulmans, sont établis. Le message véhiculé par ces dessins, dans ce contexte, est susceptible d’attiser les passions à un moment où elles sont déjà exacerbées. Il est trop facile de se réfugier derrière la notion de liberté de la presse que nous défendons pour se livrer à des provocations irresponsables dont l’objectif serait, nous le craignons, mercantile.
La liberté d’expression et d’opinion reste un principe intangible dans notre démocratie. Elle n’exclut pas le sens des responsabilités. Néanmoins, force est de rappeler que, en tant que représentants de Français de l’étranger présents partout dans le monde, notamment dans les pays musulmans, nous sommes attachés au dialogue des cultures, au respect des libertés et des croyances. Le ministère des Affaires étrangères pourrait le rappeler à cet hebdomadaire satirique et attirer son attention sur les conséquences prévisibles de sa publication tant sur l’aggravation des tensions politiques dans le monde arabe que pour nos ressortissants qui y résident.
Veuillez recevoir, Madame la ministre, chère Hélène, l’assurance de ma considération la meilleure.
Monique Cerisier ben Guiga