Peu à peu nos expatriés se sont fait de nouveaux amis ; ils ont adhéré à des associations, pour voir d’autres gens, pour se distraire, pour s’occuper. C’est qu’il faut vaincre l’ennui lorsqu’on est (presque seul) à l’étranger et qu’on n’y connaît pas grand monde.
Le climat est merveilleux et la santé s’améliore peu à peu ; les rhumatismes ? On n’en parle plus. L’arthrose ? Oubliée ! A la place arrivent d’autres maux. Un peu de diabète : on a tendance à forcer sur les gâteaux. Du cholestérol, c’est la faute de la bonne qui met trop d’huile dans ses petits plats. La tension est trop élevée : c’est que les restaurants sont moins chers qu’en France et après tout, on n’est pas venu ici pour se priver non ? Et puis il fait trop chaud pour marcher et prendre de l’exercice…
Un triste jour, l’un d’eux disparaît ; il a eu une brève maladie, ou un arrêt cardiaque, ou un accident et l’autre se retrouve seul. Les problèmes placés en embuscade derrière le mirage de la belle vie, déboulent. Comment faire face ? Le veuf, la veuve, anéantis ne font plus face qu’à moitié. Certains, mais ils sont peu nombreux vont retourner « au pays », s’abriter derrière des enfants qui vont les aider, des lois qui vont les protéger. Les autres vont rester là. La déprime les guette, leur santé en prend un grand coup et la vieillesse les attend montre en mains. L’argent aussi fait défaut : la pension de réversion paraît maigre. Et cette sacrée solitude qui s’aggrave… Il ne reste plus grand monde quand on n’a plus rien à partager. Le loyer est trop cher, ou la propriété ne peut plus être entretenue. Il faut déménager pour un appartement bien plus petit, et bruyant, et mal situé. La dépression s’aggrave. Le physique suit rapidement le moral à la baisse.
Le Consulat s’émeut. Quelqu’un a signalé que dans tel quartier, un vieux monsieur, une vieille dame, seuls, avec de maigres ressources paraissent s’enfoncer dans les problèmes. Au mieux, ils sont aidés par la bonne toujours présente et fidèle. Au pire, ils vont tomber entre les mains d’un « chacal » qui va se faire donner tout ce qui leur reste et les laisser complètement à l’abandon et sans soin, parfois même leur faire subir des sévices, ça s’est vu. Le Consulat fait une enquête : on mandate la Société de Bienfaisance qui va faire un colis de nourriture, acheter des médicaments, aider à remplir des formulaires ; l’assistante sociale ouvre un dossier pour la prochaine Commission Consulaire d’Action Sociale ; mais elle ne se réunira que dans 8 mois ! En attendant la vie continue de se consumer. Il n’existe en dehors de la métropole aucune structure d’accueil, aucune possibilité de mise sous tutelle. Pas de maison de retraite, ou un nombre de places quasi nul, pas de maison médicalisée, pas d’aide à domicile, pas de personnel soignant qualifié… pas de prise en charge de la Sécurité Sociale française. La CFE ? Elle rembourse les frais médicaux, certes, mais quid de tout le reste ?
Viviane Claverie
A suivre…
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