Le rôle des diasporas africaines est généralement reconnu en terme de développement économique mais la représentation politique de ces diasporas est très diversifiée. Elle est le fruit des options choisies par les Etats, de leur conception de la Nation, de la volonté de financer un dispositif de représentation dédié, comme en Europe d’ailleurs.
Si l’Italie, le Portugal et la France se situent en pointe de la représentation, avec à la fois une assemblée représentant en propre les résidents de l’étranger et une représentation au sein des parlements nationaux, la représentation politique des diasporas européennes est loin d’être systématique, certains Etats ne reconnaissant d’ailleurs pas le droit de vote à leurs ressortissants résidents de l’étranger.
En 2006, l’initiative internationale pour l’Union Africaine (I.U.A.) faisait des diasporas l’objet d’un colloque organisé au Palais du Luxembourg , colloque axé sur « une plus grande contribution des diasporas au développement de l’Afrique » : Serge Abessolo (docteur en droit et avocat au barreau de Paris) évoquait ainsi le droit de vote et de représentation politique des Africains de l’étranger comme « n’étant pas le sujet le plus débattu de tous ceux qui agitent les démocraties africaines depuis 1990 » tout en mentionnant néanmoins que certains membres de l’Union Africaine envisagent de faire des diasporas une « sixième région » d’Afrique représentée à l’U.A.
Suite à l’initiative prise par Kofi Annan dans le cadre des engagements du millénaire (2000), vingt sièges à l’Assemblée générale du conseil économique, social et culturel (Ecosoc) de l’UA sont d’ailleurs réservés aux représentants de la société civile africaine de l’étranger.
Une série de pays africains reconnaissent à leurs ressortissants résidant à l’étranger tout ou partie de leur citoyenneté politique et sont donc moteurs dans le domaine de la représentation.
Ainsi, l’Afrique du Sud, l’Algérie, la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Burundi, le Gabon, le Mali, le Niger, la République Centrafricaine, Sao Tomé, la Tunisie ou le Sénégal, reconnaissent à leurs citoyens vivant à l’étranger le droit de vote.
La représentation politique spécifique des Africains de l’étranger au sein des parlements nationaux africains est plus rare mais très significative au Mali où 13 députés maliens sur les 129 que compte l’Assemblée nationale représentent des Maliens habitant à l’étranger ; au Sénégal, quatre sénateurs représentent les sénégalais établis à l’étranger.
En Algérie, la représentation des Algériens de l’étranger est également importante : par leur influence politique d’abord, en 2009, 950 000 ressortissants algériens en âge de voter étaient ainsi dénombrés pour le scrutin présidentiel dont 776 000 en France où 134 bureaux de vote avaient été installés. Sur le plan de la représentation également puisqu’en 2007, les Algériens résidant à l’étranger avaient voté pour élire 8 députés dont 4 députés représentant les Algériens de France.
En conclusion, la participation des Africains étrangers aux affaires publiques de leur pays d’origine est de première importance compte tenu souvent du poids économique et politique des diasporas. La disparité des régimes de représentation ne doit pas dissimuler qu’une réelle tradition de représentation politique des Africains de l’étranger existe déjà dans bon nombre de pays.
La « mondialisation » et l’accélération de la mobilité des personnes, les mouvements migratoires, du Sud vers le Nord, ou dans un sens Sud-Sud, posent la question de la pluri-appartenance culturelle et politique : fournir aux Africains de France un accès à une « citoyenneté de résidence » par le vote aux élections locales serait surement un des moyens possibles pour faire reculer le sentiment de xénophobie dans l’hexagone.
La double appartenance politique et culturelle, africaine et européenne, est stimulée par les passerelles entre nos deux continents : la représentation politique des Africains de l’étranger en est une, significative, leurs représentants étant les premiers ambassadeurs de l’Afrique en Europe et de l’Europe en Afrique, la binationalité en est une autre, relevant elle aussi d’un sentiment de multi-appartenance adapté à une époque mondialisée.
Boris Faure
Vice-président de Français du monde-adfe