Suivre son conjoint en expatriation implique des changements conséquents, parfois professionnels car certains sont obligés d’abandonner leur activité. Ce changement de statut augmente souvent la dépendance financière du conjoint sans emploi. Cette dernière se fait d’autant plus ressentir à la retraite.
Quelques chiffres pour commencer : aujourd’hui, un jeune cadre croit encore que sa retraite sera entre 60% et 70% de son dernier salaire. Or, les dernières simulations de l’INSEE donnent une moyenne comprise entre 40% et 50% du dernier salaire. Dans ce cadre, la réversion au conjoint survivant serait comprise entre 16% et 24% de la dernière pension du défunt.
Ainsi, on peut légitimement s’inquiéter du niveau des pensions pour nos compatriotes ayant cessé leur travail durant leur expatriation. Durant ce laps de temps, ils ne pourront en aucun cas bénéficier des points de retraite. Les mois ou les années sont donc perdus. Ce problème peut être en outre aggravé par une éventuelle séparation du couple, suivie d’un remariage. En effet, dans ce cas, la réversion est calculée au prorata des années de mariage.
Il devient donc impératif (dans l’attente d’une éventuelle réforme, qui améliorerait la situation), de penser à des solutions individuelles de protection sociale :
- La Caisse des Français de l’étranger (CFE) : pour assurer une continuité avec le régime de retraite de base français, le conjoint peut s’inscrire auprès de la CFE, au régime d’assurance vieillesse des personnes chargées de famille. Cette solution est particulièrement intéressante pour les expatriations provisoires, car elle permet de garder un lien avec la Sécurité sociale française. Elle permet ainsi d’assurer une transition vers la reprise d’activité lors du retour en France. Cependant, cette solution reposant sur la cotisation volontaire est très onéreuse. Sans réforme de la CFE, il est préférable que cette solution soit provisoire. Sur le long terme, il convient donc d’envisager des solutions privées. Il existe ainsi de nombreuses sociétés françaises spécialisé dans le conseil prévoyance des français expatriés, qui peuvent être source d’appui pour nos compatriotes.
- Le rachat de trimestres : de 1045 € à 6167 € en fonction de l’âge et des revenus. Il s’agit d’une dépense importante qui ne se justifie que si elle procure un gain de retraite.
- Les contrats d’assurance-vie: il s’agit d’enveloppes juridiques et fiscales visant à constituer un capital à partir d’une épargne régulière ou ponctuelle. A terme, ce capital génèrera un revenu complémentaire sous forme de rente viagère ou de retraits partiels.
- L’ immobilier : il s’agit la plupart du temps d’une acquisition à crédit. Les différentes lois fiscales sont également incitatives ; cependant, elles ne concernent que les expatriés qui paient leur impôt en France (c’est le cas des fonctionnaires). Une majorité d’investisseurs n’envisagent pas de revendre au terme de l’avantage fiscal. Ainsi, le loyer perçu permet de constituer un revenu d’appoint aux faibles pensions de retraite.
Cependant, ces solutions demeurent complémentaires et aléatoires :
- Complémentaires, car elles viennent apporter un revenu supplémentaire qui vient s’ajouter à une pension retraite souvent basse. Elles ne doivent donc pas être perçues comme des revenus de substitution. Cela serait en effet dangereux car les revenus obtenus de tels placements sont très fluctuants et incertains. Ainsi, penser ces revenus en terme de substitution revient à prendre le risque de n’en avoir aucun au moment de la retraite.
- Aléatoires, car ces placements demeurent des placements financiers. La valeur de l’assurance vie (surtout quand celle-ci est composée majoritairement d’actions) et de l’immobilier demeure conjoncturelle. De fait, l’épargnant n’est pas à l’abri d’un effondrement de la valeur de son épargne, comme le démontre le krach de ces derniers mois.
La solution optimale reste donc de repenser notre système de protection sociale, et en particulier les retraites, pour que celui-ci soit plus juste et plus solidaire.
Mehdi Benlahcen