Accueil 5 L'association 5 Quelques mythes au sujet du bilinguisme

Il y a beaucoup de pays dans le monde qui  peuvent être considérés comme verbalement bilingues ou trilingues. Malgré cette réalité, l’idée de l’effet négatif du bilinguisme précoce a hanté l’inconscient collectif pendant de longues années.

Les enfants qui parlent deux langues sont moins intelligents. Les études faites dans les années  20, 30  et40 mélangeaient des attitudes envers l’immigration de certains groupes et les aptitudes de ces enfants. Une conférence en 1928 au Luxembourg a conclu que le bilinguisme était dangereux:” l’emploi simultané de deux langues vivantes crée des habitudes morales dissolvantes, préjudiciables à la solidité du lien moral qu’un enfant droit, à son insu, établira une fois pour toutes, entre le mot et la chose.” Les tests utilisés avaient  de grands défauts culturels qui donnaient de plus mauvais résultats aux enfants bilingues et biculturels et  souvent ne prenaient pas en compte le milieu social des enfants. Depuis plusieurs années  les évaluations des enfants bilingues sont mieux faites et ces enfants ne sont pas moins intelligents que les enfants monolingues.

Les enfants bilingues vont être obligés d’apprendre les matières scolaires deux fois dans les deux langues.  C’est encore une idée qui a persisté longtemps jusqu’aux études faites au Canada par Lambert dans les années 60. Ces études montrent que les connaissances apprises dans une langue peuvent être exprimées sans difficulté dans l’autre.

Tous les enfants peuvent apprendre deux ou trois langues facilement : oui c’est vrai à leur niveau linguistique, mais tous les enfants n’ont pas la même aptitude pour apprendre des langues, ils ont des motivations différentes, ils sont dans des situations familiales différentes. La stabilité et la mobilité de la famille jouent un rôle important. Il y a aussi les attitudes des différents membres de la famille envers les langues parlées. Et un enfant qui a des difficultés pour une raison ou une autre pour parler dans sa première langue aura des difficultés dans la deuxième. Chez le jeune enfant, une seconde langue peut se perdre aussi rapidement qu’elle a été apprise si elle n’est pas utilisée.

La langue maternelle est sacrée : oui c’est vrai qu’il y a un lien émotif très fort avec la langue parlée par la mère, mais c’est plus complexe que ça; les enfants peuvent oublier leur langue “maternelle” et apprendre rapidement et avec souplesse une autre langue qui devient leur première langue. Une langue dominante semble toujours exister mais ce n’est pas nécessairement la langue de la mère.

C’est facile d’être bilingue si on est dans une situation bilingue : le vrai bilingue est très rare. Parler anglais à l’école et français à la maison est souvent à l’origine de faux bilingues, faibles dans les deux langues parce que l’enfant a une expérience limitée dans les deux langues. L’enfant a besoin d’une expérience très riche dans les deux langues et quand il grandit son langage doit devenir plus complexe (et ici je ne parle pas de l’écrit et de lecture dans les deux langues). L’enfant acquiert naturellement tout système linguistique dont la maîtrise lui est utile pour établir des relations affectives avec les personnes de son entourage.

L’enfant doit d’abord apprendre une langue et après apprendre l’autre: toutes les études montrent que les enfants peuvent apprendre deux langues en même temps s’il y a un entourage  avec une attitude positive et non stressant envers cet apprentissage.

Les enfants bilingues en français et anglais par exemple vont parler “franglais” : les études montrent que les enfants, même très jeunes peuvent tenir séparées des langues différentes. Le travail supplémentaire  que doit fournir le cerveau de l’enfant bilingue par rapport à celui du monolingue est au centre de la question de l’influence du bilinguisme sur l’intelligence.

Kersti Colombant

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