La ministre déléguée chargée des Français de l’étranger, Hélène Conway-Mouret, vient de publier un plan d’action en faveur de l’enseignement français à l’étranger. A cette occasion, nous l’interrogeons sur trois dossiers importants dans le domaine de l’éducation : la politique scolaire extérieure qu’elle entend mener, la baisse de la subvention de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE), et les résultats de la réforme des critères d’attribution des bourses scolaires qu’elle a portée. Entretien.
Français du monde-adfe : A la suite de la concertation sur l’avenir de l’enseignement français à l’étranger que vous avez engagée au printemps dernier, vous venez de publier un plan d’action. Quelles sont vos priorités en matière de politique scolaire extérieure ?
Hélène Conway-Mouret : Au terme d’une concertation à laquelle a été étroitement associée Français du monde-adfe , nous avons adopté un plan d’action, qui permettra de répondre à la demande croissante d’enseignement français dans le monde. Longtemps universitaire, je sais combien la transmission de notre langue et de nos valeurs est déterminante pour les familles vivant à l’étranger. Notre ambition est d’apporter une offre éducative au plus près de nos compatriotes. Le réseau des écoles homologuées reste au cœur de notre stratégie, pour garantir la « continuité éducative » et réunir les conditions d’une bonne intégration au moment du retour. Nous avons aussi pris en compte les enfants qui sont scolarisés dans les écoles nationales, par nécessité ou par choix. C’est pour eux que nous développons les filières bilingues, afin de créer un réseau d’écoles labellisées « FrancEducation ». Nous soutenons par ailleurs l’enseignement à distance avec le CNED, qui propose désormais une offre de cours spécifique pour les élèves français et étrangers scolarisés dans le système éducatif local de leur pays de résidence. Nous accompagnons également le développement du programme FLAM. Ce plan d’action consacre la qualité du partenariat entre le tissu associatif et les pouvoirs publics. Enfin, parce que l’enseignement français est une priorité politique, le ministre des Affaires étrangères présidera chaque année une réunion des 7 ministres concernés (Education nationale, Enseignement supérieur, Budget, Commerce extérieur, Francophonie et Français de l’étranger) qui fixera les grandes orientations stratégiques pour la prochaine rentrée scolaire. Je me réjouis du rapprochement avec l’Education nationale qui était attendu depuis longtemps.
Fdm : Le projet de loi de finances 2014 prévoit une baisse de la subvention de l’AEFE de 8,5 millions d’euros. Comment répondez-vous aux inquiétudes des personnels des établissements du réseau résultant de cette diminution ?
H.C.M. : Le redressement économique de notre pays impose des efforts budgétaires. Il est donc juste que l’Etat montre l’exemple et investisse utilement. Le Parlement a voté pour 2014 une diminution des dépenses de l’Etat à hauteur de 14 milliards. Il s’agit d’un effort sans précédent. Il en va de notre souveraineté et de notre capacité à préparer l’avenir des futures générations. Tous les ministères et tous les opérateurs publics, dont L’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE), sont mis à contribution. L’AEFE verra donc sa subvention diminuer de 2 %. Je peux cependant vous assurer que cette baisse n’aura aucun impact sur les frais de scolarité, sur la rémunération des personnels ou la qualité de l’enseignement. J’ai lu ici ou là que certains associaient cette diminution à l’augmentation des crédits consacrés aux bourses scolaires. C’est faux, car il s’agit de crédits différents. Le budget adopté récemment en atteste : le gouvernement confirme la priorité donnée à la jeunesse et à l’éducation, en France comme à l’étranger. Pour preuve, le budget des bourses augmentera de 8 millions d’euros l’année prochaine !
Fdm : Vous avez porté une réforme importante des critères d’attribution des bourses scolaires. Des craintes de déscolarisations d’enfants, liées à la baisse potentielle des quotités de bourses perçues par les familles dans le nouveau système, ont été exprimées quand vous avez présenté cette réforme. Qu’en est-il exactement ? Est-il nécessaire d’ajuster le nouveau mode de calcul des quotités de bourses ?
H.C.M. : Le système de bourses était arrivé en bout de course. Surtout depuis la mise en place de la PEC, qui, si elle avait été élargie, aurait coûté 750 millions d’euros à l’Etat ! Or, rien n’avait été budgété. Sa suppression – un engagement de campagne de François Hollande – a été ma première décision. Si je ne l’avais pas prise, c’est tout l’édifice des bourses qui se serait effondré. Les ajustements successifs avaient de surcroît progressivement rompu l’égalité de traitement entre familles et entre pays. Nous favorisions les familles les plus aisées. Ce n’était plus tolérable. Une remise à plat du système d’attribution s’imposait. Nous avons donc proposé et mis en place de nouveaux critères d’attribution. Nous attendons à présent la seconde Commission nationale pour apporter les ajustements qui s’avèreraient nécessaires. Cette première année est une année pilote. L’important est que l’objectif de la réforme soit atteint : qu’elle apporte un soutien aux familles qui en ont le plus besoin ! J’assume pleinement cette orientation. Nous ne pouvions continuer cette fuite en avant sans prise en considération de critères objectifs, économiques et sociaux. Nous avons fait le choix de soutenir les familles les plus fragiles. Je prends date avec nos partenaires en fin d’année. Nous aurons alors une photographie plus juste de l’application du nouveau dispositif.
Propos recueillis par Mélina Frangiadakis